10 janvier 2013 4 10 /01 /janvier /2013 11:50

2012-06-30 15.34.46

Puis-je encore
Happé ainsi
L'écran, le petit, le grand
Et le cahier
Et la concentration
Puis-je encore
Discerner, voir si bien
L'eau qui court
Le silence par-dessous
Quand tout s'agite
Et mon œil avec
Et mon pensé pareil

S'il n'y avait d'éléments
Sommaires et suffisants
Pour toucher le sol
Saisir l'air, humer lumières
Que le nécessaire
Il me semble qu'ainsi
À tant trier sans cesse
Sans compter encore
L'immédiateté entre tous
Puis-je encore vraiment
Recevoir l'infinitésimal
Devenir le creux
Comprendre du dedans
Le lent, l'immuable, le transparent

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9 janvier 2013 3 09 /01 /janvier /2013 17:23

2012-10-26 11.34.33


Je suis mal équipé
Je sais pas comment faire
La vie, ici, avec tous ces trucs
Je me sens tout débile et con
Empoté de première aux bras ballants
(C'est que ça m'intéresse pas beaucoup
Aussi
Ce qu'on me propose, ce qu'on me tend)
Je suis mal équipé
J'ai pas le bon caractère
Pas la bonne attitude
Tu vois
Il faudrait croire autrement
Sentir et oser autrement
Mais moi je crois, je sens et j'ose comme ça
Et ouais, ça fonctionne moyen, ça fonctionne petit
Ma foi, ça fonctionne comme ça peut
Je suis mal équipé
J'ai pas le rendement optimal sur la grande machine
Ça pourrait dépoter plus, sans doute
Il faudrait revoir la stratégie, le business plan
Tu vois
Mais je sais pas comment faire, la stratégie, le plan
J'ai pas l'esprit, pas le culot, pas l'envie
En fait, je m'en fous un peu, mais non
Je m'en fous pas du tout, j'aimerais bien
Tu comprends
Faire ce que j'aime et c'est tout
Prendre la 66 tous frais payés (c'est une image)
Écrire le ciel, chanter mon sang et photographier des hébétudes
Comme ça, au jour le jour et sans s'arrêter
Sans penser à rien d'autre, sinon l'existence
L'intime des autres quelques heures par jour, en miroir
Mais c'est tout, fini les emmerdements, juste l'amour du faire
L'être dans le faire, complètement, intégralement, absolument
Je suis mal équipé
J'ai pas compris comment goupiller l'affaire
Je cherche encore, on sait jamais
Ça pourrait finir par donner quelque chose
Genre, du bonheur, pourquoi pas
Tu vois

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25 octobre 2011 2 25 /10 /octobre /2011 17:51

DSCN1839

Un corps qui se réveille et se lève. Un être qui spontanément passe de son horizontalité reposée à l'éveil vertical. Ça se passe comment? Ça se vit comment? Je ne sais plus. La conscience qui doucement émerge des songes, passe de la nuit au jour, ses pensées de l'obscurité à la lumière, et quelque part dans les tissus, irrigations, soubresauts, les muscles d'une légère irritation demandant à s'étirer, les articulations qui craquent, la mâchoire qui s'ouvre dans un bâillement d'ogre, gueule prête à avaler le monde, un appétit de photons, narines énervées humant l'air, les poumons qui poussent les côtes et bousculent les organes. Et l'humeur, l'humeur, couleur d'âme au pied du jour, appel d'air dans la poitrine, la voix qui chante avant de parler. Juste l'envie de se lever. Le besoin de bouger. Toute la machine qui se met en branle, de sa propre initiative. Je dois m'en souvenir, pour pouvoir le décrire, ce réveil dont je ne me souviens pas. J'ai deux semaines devant moi pour retrouver le plus élémentaire, le plus primitif de mes mouvements. Une semaine de permanence où je commence plus tard, puis une semaine de vacances, où je commence quand je veux. Je me lève parce qu'il le faut, parce que c'est l'heure. Je n'ai jamais assez dormi, jamais assez bien. Je ne ressens jamais l'envie de me lever, sinon en posant sous le nez de mon esprit la carotte d'une heure d'écriture avant le travail, je donne des coups de pique sur la peau de mon sommeil, je titille la bête, l'empêche de retomber dans ce qui obsède chacune de ses cellules. Violence. Chaque sacré putain de matin. En deux minutes, tandis que je marche en titubant, j'ai au cœur de la poitrine un tremblement vif et désagréable, une agitation frétillante comme un poisson sorti de l'eau qui cherche désespérément à respirer de ses branchies violentées par l'oxygène pur. Je pourrais avoir un besoin vital de dormir, un désir subtil de jouer avec les muscles de ma nuque, la plus noire et la plus irritée des humeurs, soif ou faim, je n'y prête guère attention: tout ce qui compte c'est l'urgence d'être au plus vite installé pour écrire et m'assurer le temps de transition qui rendra le départ au travail moins difficile. Mais c'est perdu d'avance: pour peu que j'ose me l'avouer, tout est déjà difficile, avec un tel régime de violence, de volontarisme indélicat, de surdité totale a ce qui a lieu en deçà de ma décision.


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13 octobre 2011 4 13 /10 /octobre /2011 05:06

08092011749

Ce sont des vertiges effrayants, des commotions d'esprit qui me laissent sans mots, pris entre effarement, effroi, incrédulité... Un sentiment d'impuissance où vient se loger la conscience de ma responsabilité comme un vers dans une pomme. Au rappel d'un événement marquant qui semble avoir eu lieu hier mais s'inscrit à une année de distance dans la réalité, comme à la vision saisissante d'une lune pleine, nacrée, dont la phosphorescence baigne dans les vapeurs mauves du soir. Pas possible. Un tel décalage entre ma perception et le réel. Une telle beauté s'imposant à mon oubli, l'interrogeant, suscitant et ressuscitant les plus existentielles des questions. Je vis, ou je passe à travers la vie. La vie passe en moi, le sais-je encore? Puis-je en nommer la saveur? Suis-je capable de tout abandonner pour contempler jusqu'à ce que mes yeux pleurent de ne pouvoir se fermer sur celle qui sublime maintenant le crépuscule? Tout ce qui m'arrive est bon. Mais il m'arrive trop de choses en même temps. Est-ce que ça reste bon, à vivre? Je suis où, dans tout ça? Qu'est-ce que je goûte réellement? Dans le velours du temps, suis-je bien calfeutré? Je ne mange plus, je mets des choses dans mon corps. Je ne dors plus, j'attends que l'épuisement m'assomme – et il ne vient qu'une fois consumée les braises vivaces de mes pensées. Je n'échange plus, je dépose à qui veut bien des pièces de moi de-ci de-là. Je ne pèse plus, je passe, saute, cours. Et dans un autre vertige, parfois, surgit du fond de mon intuition, du centre de ma fatigue, confusément, la sensation d'une grossière erreur, une angoisse tissée de doute: et si, au moment où survient enfin le tant attendu, je passais plus que jamais à côté de l'essentiel?

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7 octobre 2011 5 07 /10 /octobre /2011 08:39

Saintes-Maries-2011 0100

Un arbre sec, aux fibres si recroquevillées sur elles-mêmes qu'elles le déforment et empêchent la sève de s'écouler. J'ai vu cet arbre un bref instant, au moment où j'ai cessé de réfléchir. Il s'est réfléchit en moi, reflétant l'état de ma colonne vertébrale, mon tronc de vie. Douloureuse, comme tenue entre des mains de fer qui l'enserrent, la compressent, font sortir d'elle le dernier reste de fluidité. Hier et ce matin. Omoplates qui se font sentir comme des muscles courbaturés, nuque ensablée, presque cimentée, mâchoire qui craque quand je l'ouvre grande. Quels étranges choix. Quels sont les vôtres? Comment diable nous arrangeons-nous pour rendre la tâche plus compliquée qu'elle n'est déjà? Comment fais-je pour monter ainsi la vie contre moi? Hier l'un de mes superviseurs questionnait mes représentations, si similaires à celles de la personne que j'accompagne qu'elles interfèrent dans la rencontre: sans doute souhaite-t-on faire ce qu'on aime... Mais peut-on apprendre à aimer ce que l'on fait? La réalité étant ce qu'elle est: une longue inadéquation entre l'aspiration et ses données immédiates. J'ai toujours pensé qu'il était question de tempérament: j'observe que certains individus ont la capacité spontanée à se couler dans des vies multiples et à toujours y trouver leur compte, et que d'autres, comme je me sens être, sont obstinés par ce qu'ils aiment faire par dessus-tout et qu'ils n'ont qu'une seule attente, immense exigence, celle de plier le réel à leur désir pour enfin respirer de ce grand amour qu'ils espèrent. Certains sages n'invitent-ils pas à quitter l'action sans amour pour se diriger vers l'amour agi, quel qu'en soit le prix? Le superviseur interrogeait mes représentations, j'interroge les siennes. Je n'ai pas la réponse, et sans doute chaque être trouve la sienne. Je connais ma douleur, chaque fois que je contacte cette aspiration butant contre les limites du réel, je connais la souffrance qu'il y a à quitter ce que j'aime au jour le jour pour me diriger vers les obligations de ce que j'aime moins. Et qui pourtant, me permet aussi de faire ce que j'aime: grâce aux finances disponibles, à l'intégration sociale et toutes ses bienheureuses conséquences sur l'estime personnelle et le besoin de présence, aux rencontres favorisées, aux contraintes par lesquelles une personne se construit, le contenant qu'elles offrent à une vie qui sinon se morcelle et s'éclate. Non, je n'ai pas de réponse, et je n'y vois que complexité et contradictions complémentaires, décidément. Je n'ai pas de réponse, mais j'ai une colonne vertébrale en flammes, depuis que je me suis installé sur le lit pour écrire, le bois sec a pris feu et la chaleur cinglante tend à me monter dans le crâne par petites flèches. Et j'aurais besoin qu'avant d'être interrogé dans mes représentations, l'on puisse faire un peu de place à ce qu'elles disent de moi, leur donner aussi le droit d'exister, telles qu'elles sont – devinant là que si elles ont pris cette forme ce n'est pas pour rien, et qu'on ne viendra pas les déloger si facilement de mon monde intérieur en leur faisant un croc-en-jambe. J'aimerais qu'avant d'instaurer le doute là où il y en a déjà tant, l'on puisse reconnaître la valeur et la légitimité de cet univers qu'est le mien, aussi irrationnel, déraisonnable, illusoire, fantasque, enfantin ou que sais-je puisse-t-il être. Cet univers, je l'aime et j'y suis attaché, et s'il finit par changer, c'est toujours de son propre mouvement, et souvent après avoir été accueilli par une chaude bienveillance.

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28 septembre 2011 3 28 /09 /septembre /2011 18:17

Saintes-Maries-2011 0220

J'ai le souhait, secret, qu'à la façon dont il a pu me tenir prisonnier d'intriquées situations, le contexte, par une perche tendue, me tire de ce pas – qui n'est pas un mauvais pas mais un pas forcé. Tout ce qui m'arrive est bon, tout ce que je cherche a la goût du désir, c'est déjà bien puis-je me dire par la tête. Mais de n'avoir le temps d'aimer seulement ce que je fais, sans pouvoir faire un peu de place à aimer ce que je suis – ou même à seulement recevoir ce que je vis – , et surtout de constater que rien du temps consacré à rencontrer celles et ceux que j'aime déjà ne se déploie, sans compter l'opportunité de rencontrer celles et ceux que je pourrais aimer bientôt... C'est la solitude qui me chagrine. Si je devais pointer du doigt la fausse note dans cette partition, je ciblerais tous ces silences, dans chaque mesure, pleines à craquer de rapides noires, où j'installe pour y respirer au moins une ou deux rondes, sinon des blanches, mais où j'aurais besoin de remplacer les silences par un signe que je ne connais pas – des croches peut-être, en ce pont qui les relie deux par deux, mais elles sont trop brèves, trop rapides, pour dire combien j'aurais aimé hier soir, plutôt que d'avoir à me rendre à l'obligée réunion associative, aller profiter des dernières douceurs de la saison, sur une terrasse, en compagnie de liens qui n'ont pour légitimité que l'affection portée de part et d'autre. Vous me manquez, amies, amis, proches membres de ma famille, demoiselles que je ne connais pas encore, ou que je commence tout juste à côtoyer. Je n'ai pas pris la mesure hier soir – à l'image de toutes les récentes occasions – de bien sentir ce qu'il se passait à l'intérieur de moi, tandis que je passais en vélo à côté des tables de bistro où les gens s'étaient installés, discutant de leurs airs complices dans les douceurs atmosphériques d'un soudain regain de chaleur. La température était particulièrement douce pour la saison, et même cela, je ne suis pas bien sûr d'en avoir saisi la saveur sur ma peau pressée par le temps. Je me souviens, et je profite de cette heure où nulle urgence ne parvient à perturber mon voyage intérieur, je me souviens maintenant de ces deux filles assise face à face, se souriant, buvant leurs nectars autour d'une petite table, sur un coin de trottoir où j'aurais aimé moi aussi m'arrêter, faire la conversation, m'arrêter, m'arrêter. Je me souviens de nombreuses tablées, également souriantes, aux apparences insouciantes, qui semblaient toutes en avoir fini avec les nécessités du jour, pouvaient se reposer un moment en agréable compagnie, partager un bon moment. Je me souviens de la façon dont mon regard s'attardait sur ces scènes, dont la banalité cachait mal le caractère précieux à l'équilibre du monde humain. J'aimerais maintenant décrire à mon esprit la façon dont je pouvais sentir combien quelque chose de moi aurait préféré mille fois s'arrêter là plutôt que de continuer mon chemin vers mes obligations – même si la sympathie m'y attendait. J'ai senti quelque chose. Comme si chacune de ces tablées venait se heurter contre une membrane à l'intérieur de moi et la faire vibrer – sans que je n'y prête plus attention. C'est seulement maintenant, tandis que j'y retourne, sur ma selle, dans l'air tiède, ma précipitation pour arriver à l'heure, ces visages entraperçus, qu'un peu de place est faite à ce qui s'est mis à résonner. Et le message est très clair, ce qui s'exprime à travers le saisissement de mon attention, la façon dont je suis happé sans m'en rendre compte par ce que je vois et ce que j'imagine. Pouvons-nous prendre soin? Pouvons-nous entendre? Le puis-je, moi qui parle, et qui met un peu de « nous » pour me sentir moins seul, pour vous inclure, par peur du jugement sur cette parole qui se mire dans le miroir de sa conscience, comme si elle ne se préoccupait que d'elle-même, tandis qu'elle prétend et espère que ce n'est qu'ainsi que la possibilité d'une rencontre de connivence et de différence, d'agacement ou d'indifférence, puisse opérer au plus près de nos intimes réalités. Puis-je prendre soin? Puis-je – sans attendre, sans ajourner? J'entends ce qui résonne si fort maintenant, m'étreint et me fait soupirer, et je me dis: après le concert, encore quelques jours de préparation où j'accepte que la priorité soit ailleurs, et je les appelle. La priorité, quelle priorité? Et si « préparer un concert » ne se résumait pas à ma représentation – rendue étroite et pauvre par l'angoisse – mais intégrait nécessairement ma qualité de vie? Non pas seulement la régularité de mes exercices et répétitions? Et si d'aller boire un verre aujourd'hui, demain, avec quelque salutaire présence, me permettait de mieux chanter samedi, si j'allais nourrir mon inspiration et ma maîtrise à d'autres auges que les seules qui me viennent automatiquement à l'esprit: le travail, l'application, l'entraînement quotidien?! Et si de prendre du bon temps favorisait ma faculté d'en donner samedi autant que mon intransigeante discipline? Puis-je transmettre du plaisir si mon expérience en est privée? Puis-je me disposer au lien du public si je m'y prépare en me coupant de toute relation? Je ne fais pas semblant de ne pas avoir la réponse. Mais ces questions m'interpellent...


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26 septembre 2011 1 26 /09 /septembre /2011 03:46

Saintes-Maries-2011 0026

Écrire me rend triste. Je ne suis pas triste avant d'écrire, ces temps. Je n'ai pas ces lancées fuligineuses au milieu du thorax, n'ai pas la gorge si serrée, jusqu'au moment où la page me regarde et m'interroge. Ça commence au moment où elle attend de recevoir les réponses à ses questions sans objets, dispose ses lignes à ma plume comme les cordes d'un étendoir où crocheter une à une les lingeries de mon intimité. Mais est-ce d'écrire ou de retourner mon attention, de laisser flotter au vent mes tissus en attendant qu'ils sèchent, m'apercevant souvent qu'il ne sont pas si propres qu'escomptés? Créé ou révélé ce remugle d'émoi? (L'odeur n'est pas si mauvaise qu'elle est chargée). Que tout s'arrête. Ou qu'on m'ôte un membre. Qu'on ampute cette vie qui s'agite telle la déesse aux milles bras. Aimer trop de choses a peut-être quelque chose à voir avec trop aimer. Même dévastation, de lieux différents. Même confrontation aux limites de l'altérité. Que reste-t-il à respirer? Que reste-t-il à contacter dans cette confusion? Là où rien ne semble jamais finir. Là où aucun geste ne peut achever sa course, si bien qu'il ne peut se laisser choir et s'abandonner à d'autres supports que ses propres muscles.

Qu'importe. Rater le transport, marcher, attendre. Si je pouvais toucher à l'indifférence, être complètement là, j'aurais cédé ma place dans la file d'attente, je n'aurais pas couru craintivement, mon souffle n'aurait pas eu à souffrir la contrition de mes côtes. Au lieu de cette peur dont l'objet ne fait pas sens – sinon d'irrationnel fondement – il y aurait eu la disponibilité à laquelle je peux enfin m'ouvrir complètement, devant ces quelques heures d'officiel congé. D'une tranquille lenteur, j'aurais erré encore un moment aux alentours de la gare, dans cette ville que je connais mal. Observé les mouvements de foule, le défilé des visages, cherché le regard d'une désirable connivence. Je me serais amusé à être là où je n'avais nulle raison d'être. Je me serais amusé à être. A recevoir le monde dans mon être, ouvert, poreux, capteur sensible d'indicibles vibrations. Membrane d'esprit carné, de chair pensante, toute là, en prise directe avec son expérience. C'eut été tout. Et très bien comme ça.



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23 septembre 2011 5 23 /09 /septembre /2011 18:57

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Que vois-je? Et cette odeur! Pied, chien, habits salles. Si encore je pouvais ôter les bruits. Masquer le réel et oublier les molécules qui se déposent sur mes muqueuses agacées. Il ne me reste que quelques minutes pour parvenir à suspendre toutes ces perceptions dans le vide lénifiant où quelque chose de moi se branche à une source dont je connais aussi mal la nature qu'elle nourrit bien la mienne. Quelques minutes d'apesanteur et me voilà disposé à faire copain-copain avec les nécessités du jour. Lequel m'attend sans intérêt particulier, tandis que j'ai l'impression qu'il se jette sur moi comme un rouleau compresseur, machine aveugle descendant la pente du temps sans crier gare, avalant sous son invincible roue quantité de nos forces, dont certaines ne s'en remettront jamais. - ô mais je me rends compte soudainement: j'y suis, je lévite! N'entends plus le brouhaha, sinon comme un lointain murmure, n'ai plus sur ma lippe la moue boudeuse du dégoût, et du mobilier qui me déplaît tant, je n'y distingue que les visages de celles et ceux qui y sont installés, humaines présences qui peuplent ma retraite intérieure... Je ne sais quelle partie de mon être enfin intiment reliée à ce qui, par je ne sais quel bienheureuse alchimie, lui fournit non seulement les ressources, mais aussi le désir d'aller se coltiner les autres avec les joies et les misères de cette aventure.


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21 septembre 2011 3 21 /09 /septembre /2011 05:10

Saintes-Maries-2011 0470

Sur les feuilles de nuit, poser en signes quelques traits lumineux, comme pour me venger du sommeil empêché. Imposer à la pénombre qui m'a rejeté de ses duvets, le souffle de ma voix venu perturber son silence. Bien que ce ne soit pas d'une lutte dont je cherche la compagnie. Non, je ne suis pas là par aigreur ou dureté, mais pour tirer de ce qui blessera la qualité de mon jour quelque infime joie. Et c'est en ne broyant pas le noir du ciel qui m'accueille mais plutôt son étrange lueur, encore parsemée de scintillements colorés, que j'espère un réconfort, une poudre magique à déposer sur ma langue endormie. Pour qu'à la place de ce que je ne peux pas obtenir en force – le retour aux terres des songes – vienne à moi l'onirique parole d'un éveil non désiré. Molle pâte d'esprit, aussi douce à ma vigilance que l'est pour ma tête le coton d'un oreiller. Ainsi, tandis que monte de l'horizon la frange claire d'un nouveau défi, je commence par me retirer de ses invitations, refusant toute mise au duel – encore qu'écrire ne soit peut-être pas si libre d'exigences que je le souhaite. Chaque jour doit-il être cette bataille? Qu'est-ce donc, la tristesse qui émerge dans l'ouverture créée par cette naïve question? Sous la meule de mon intention, passant comme la main hasardeuse du somnambule sur les objets qui l'entourent, la nuit aura laissé éclore ces quelques traces de ma présence. Il eut été si bon d'écrire comme on dort, d'abandonner ce que je dirige aux œuvres de ce que je ne dirige pas. Un jour peut-être, semblable à celui dont la poussée jette dans mon dos les ténèbres duveteuses, sera marqué par cette différence. Celle dont le vent triste, soulevé par une pauvre question, invoque l'épanouissement. Qu'elle puisse doucement, tendrement, à la manière de celui qui pourtant vit d'un éclat total et franc, qu'il fera bientôt régner sans nuances sur mon visage, qu'elle puisse doucement, tendrement, pousser par dessus-bord le contrôle opaque de nocturnes profondeurs, délicatement donner aux jours de plus tendres atours, les décharger de leurs superflus bagages – ceux qui ne servent qu'à compenser d'autres attentes, sans parvenir à assouvir leurs humbles besoins, restés informulés.


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20 septembre 2011 2 20 /09 /septembre /2011 05:39

Saintes-Maries-2011 0482-copie-1

 

Cette fine tranche de clarté, turquoise d'ouverture vers le ciel, entre deux masses gris-bleu de nuages qui s'étiolent en fines gouttelettes. Un passage entre des mondes, étroite ligne où s'engouffre mon regard, filant comme un oiseau entre les gouttes, cherchant à relier les deux extrémités, entre son nid et l'inconnue vastitude. Mais recevoir aussi, la laisser venir, sans rien faire, pas même le dire. Il y a tant de choses que je ne sais pas faire. Tant que je souhaite savoir mieux faire, pouvoir faire, encore faire, découvrir. Un appel constant du désir d'œuvrer, où le désir d'être touché s'oublie. Obstruée, la voici bouchée maintenant, la fente ovale. Un masque informe se dresse devant moi. Il reste cependant, dans un coin, une petite occlusion. Puis-je encore choisir? De ces permissions d'être, en l'accueil couvé, couvant, d'une nullité d'effort, de bras enveloppants, où s'abandonner au monde complètement. Sans même une plume avec laquelle raconter au papier mon voyage. Rapport nu, d'être à être, d'être à monde, sans forces, sans vouloir, venir là et déposer ce qui s'opère, observer. Qui s'occupe de nous, une fois que nous nous sommes occupés de tous et de tout? Préoccupé de chacun, l'œil alerte au confort de celles et ceux qui sont là, quel est le nid de chair et d'affection où respirer fait un ronronnement. Un autre nid que celui de cette table de bois, de ces murs protecteurs, de cette fenêtre ouverte en vision mais invisible en cloison. Sans doute, oui. Mais le temps presse. Urgence dans l'éprouvé. Et le temps passe, tristesse en sensation du manque. Je ne vois plus que la haute silhouette nacrée d'un cumulus, lointaine tête pâle sur laquelle se dépose les premiers rayons solaires, apparaissant comme un fantôme dans le corps gris de pluie. Nulles réponses en mots. Des mots qui ricochent, feront leur chemin, trouveront leur forme en gestation, élanceront d'un geste la demande claire et simple d'un lieu où le passage est possible.



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